Le beurre de karité, les enjeux

Arbre de karite



La production de beurre de karité au Togo et au Burkina Faso est une activité économique et culturelle essentielle, principalement gérée par des coopératives de femmes. Ce processus, qui joue un rôle crucial dans l'économie locale et l'émancipation féminine, se décline en deux méthodes principales : artisanale et industrielle.

 

La filière Karité au Togo et au Burkina Faso

Ces deux pays se distinguent comme des acteurs majeurs sur le marché mondial du karité. La production est une source de revenus vitale pour des milliers de femmes en milieu rural, leur permettant de s'émanciper économiquement. Au Burkina Faso, la filière est si importante qu'elle est surnommée "l'or vert", jouant un rôle significatif dans les exportations nationales et représentant un pilier de l'économie. Des géants de la cosmétique comme L'Occitane et L'Oréal s'approvisionnent d'ailleurs directement auprès de coopératives de femmes burkinabè dans le cadre de programmes de sourcing durable.

De son côté, le Togo renforce sa filière locale en développant des infrastructures industrielles, comme une usine de transformation de karité biologique inaugurée en 2023. Cette initiative vise à valoriser la production locale et à créer davantage de valeur ajoutée dans le pays, plutôt que d'exporter la matière première brute. Le gouvernement togolais a même suspendu temporairement les exportations de noix pour garantir l'approvisionnement des unités de transformation locales et renforcer la filière.

De la noix au beurre : un processus en deux étapes

Noix kariteLa transformation du karité en beurre suit une démarche précise, qu'elle soit traditionnelle ou industrialisée. Mais avant d'obtenir le beurre, il faut ceuillir la noix...

La récolte des noix

Cette phase artisanale est la même pour tous. Entre mai et août, les noix tombent naturellement des arbres et sont ramassées à la main, principalement par des coopératives de femmes rurales. Les fruits sont ensuite dépulpés pour ne garder que la noix. Ces dernières sont bouillies puis séchées au soleil, une étape cruciale pour pouvoir les décortiquer facilement et en extraire les amandes, qui sont la matière première du beurre.

La transformation des amandes en beurre

C'est ici que les méthodes diffèrent, chacune ayant ses propres caractéristiques et marchés cibles.

  • Méthode artisanale : Cette méthode, longue et laborieuse, est l'apanage des coopératives de femmes. Elle est le fruit d'un savoir-faire ancestral. Après la torréfaction des amandes, elles sont broyées pour obtenir une pâte épaisse. Cette pâte est ensuite pétrie et barattée avec de l'eau pour séparer la matière grasse (le beurre) des impuretés. Le beurre obtenu, pur et non raffiné, est très prisé par l'industrie cosmétique et le commerce équitable pour ses propriétés naturelles intactes.
  • Méthode industrielle : Plus rapide et mécanisée, cette approche utilise des presses pour extraire la matière grasse à chaud ou à froid. Le beurre peut ensuite être raffiné, désodorisé et blanchi pour répondre aux standards de l'industrie alimentaire et cosmétique. Ce processus permet d'obtenir un produit plus standardisé et plus homogène en grande quantité, bien qu'il puisse perdre certaines de ses propriétés naturelles. Au Togo, des entreprises comme NIOTO et Label d'Or se spécialisent dans ce type de production, répondant ainsi à une demande croissante.

Beurre karite


La production de karité est une filière stratégique au Togo et au Burkina Faso, dont la valeur économique, sociale et culturelle dépasse largement les frontières nationales.

Au-delà des étapes techniques de production, c'est un secteur qui met en lumière la place prépondérante des femmes, les enjeux de la chaîne de valeur mondiale et les bénéfices de la transformation locale.
 

Le rôle essentiel des femmes dans la filière karité

Les femmes sont le pilier central de l'industrie du karité. Elles représentent plus de 90 % des acteurs de la chaîne de valeur, de la collecte des noix à la production du beurre. Cette activité est un moteur d'émancipation et de génération de revenus pour des millions de femmes en milieu rural. Elles s'organisent en coopératives, ce qui leur permet de mutualiser leurs efforts, de partager leurs connaissances ancestrales et de négocier de meilleures conditions de vente.

Bien que le travail soit majoritairement féminin, le contrôle de la commercialisation est souvent dominé par les hommes, ce qui limite une pleine valorisation de leurs efforts. Cependant, le développement de coopératives et les partenariats avec des acteurs internationaux du commerce équitable leur permettent de gagner en autonomie et d'améliorer leurs revenus.

La part de marché mondiale et les flux d'exportation

Le Burkina Faso et le Togo sont des acteurs clés de la filière karité. Le Burkina Faso est considéré comme le deuxième producteur et exportateur mondial d'amandes de karité, derrière le Nigeria. Le Togo, quant à lui, est le septième plus grand producteur.

Les flux d'exportation sont majoritairement orientés vers l'Europe et l'Amérique du Nord, où la demande pour le karité, tant pour les industries alimentaires (substitut au beurre de cacao) que cosmétiques (ingrédient naturel), est en forte croissance.

  • Exportation de noix de karité : La majeure partie du karité exporté est sous forme de noix brutes. Ces dernières sont principalement destinées à des pays comme les Pays-Bas, la France, l'Allemagne et les États-Unis, où elles sont transformées par de grandes entreprises.
  • Exportation de beurre de karité : Le beurre transformé localement est également exporté, mais en bien plus petite quantité. Il s'agit souvent d'un produit valorisé pour sa qualité artisanale et son aspect "commerce équitable", et il est destiné à des marchés de niche, notamment en France et aux États-Unis.

L'avantage de la transformation locale : créer de la valeur ajoutée

La transformation locale des noix de karité en beurre est un enjeu majeur pour le Togo et le Burkina Faso. Elle permet de générer une valeur ajoutée significative, qui est actuellement captée par les pays importateurs.

  • Création d'emplois et de revenus : Transformer les noix sur place crée des emplois durables et qualifiés, améliorant les revenus des producteurs et des transformateurs. Cela contribue directement à la réduction de la pauvreté.
  • Renforcement de la chaîne de valeur : En développant l'industrie de la transformation, les pays africains renforcent leur position sur le marché mondial, passant du statut de simples fournisseurs de matières premières à celui de producteurs de produits finis.
  • Amélioration de la qualité : Le contrôle direct de la chaîne de production permet de garantir une meilleure qualité du produit final. En proposant un beurre de karité transformé localement, les pays peuvent se positionner sur les marchés du "bio" et du "commerce équitable", plus rémunérateurs.
  • Développement économique : Les revenus générés par la vente de beurre de karité transformé peuvent être réinvestis dans d'autres secteurs de l'économie, contribuant ainsi au développement global du pays.

Pour illustrer cette volonté de valorisation, le Burkina Faso a temporairement suspendu l'exportation de ses noix de karité pour garantir l'approvisionnement de ses unités de transformation locales, soulignant l'engagement des gouvernements à renforcer leur filière et à maximiser les bénéfices économiques pour leurs populations.

Le beurre de karité est un produit naturel aux multiples vertus, utilisé depuis des siècles en Afrique de l'Ouest. Ses applications sont très variées, allant de la cosmétique à l'alimentation.

Pour en soivoir plus sur l'utilisation du beurre de karité, allez sur cette page : Le beurre de karité